vendredi 4 mai 2007

3. Nous reverrons-nous un jour?

Elle est là devant toi. Accessible toute la journée. Mais tu sais qu’elle dira non. Alors tu t’essaie toute la journée par des petits mots détournés et tendres de la séduire. Tes subterfuges ne mènent à rien. Ils sont aisément repérés. Toi seul les crois efficaces, mais personne n’en est dupe. C’est en cela que tous les amoureux sont ridicules. Les mouvements de leur âme, les mouvements de leur être, ils vont, ils viennent, partent et reviennent sur leur pas, jamais convaincu d’abandonner, jamais certains de leur destinée. Dans l’attente et le doute, les hésitations, et parfois le désarroi. Secrètement ils exultent, si seulement l’impossible avait lieu… Car c’est bien cela qui est infiniment désirable, ce qui est définitivement refusé. « L’homme brûle de faire ce qu’il redoute le plus » disait Tadié. Tu ouvres une fenêtre de conversation, mais tu n’oses plus. Assez des échecs! Pourtant tu y penses toute la journée, tu crois, en ton for intérieur, que les choses dépendent de toi et refuses de concéder à l’autre sa part de responsabilité. En cela les amoureux sont tyranniques.

Maintenant, la paralysie. Tu souhaites, mais tu ne peux plus rien d’autre. Elle a gagné, tu es muet. Tu ne diras plus rien sinon intérieurement. Dans une dernière hésitation tu dis quelque chose, le moins possible car, tu n’as plus rien à dire, le courant ne passe pas. Ce soir tu prendras la décision d’abandonner, comme hier. Demain tu recommenceras. C’est ce que Camus appelle le mythe de Sisyphe.

Mais non tu es un chasseur, et un chasseur ne lâche pas, tant qu’il a sa proie en vue, mu par une force insondable, même dans le plus grand désespoir il trouve la force de persévérer. Pour l’honneur. L’amour est un déséquilibre stable. Mort au combat… plutôt que d’avoir déserté. Le voilà qui voit la chose sous un angle nouveau. Cette femme tant aimée pour laquelle il disait n’avoir que de bonnes intentions lui paraît maintenant comme une simple bête qu’il faut traquer, un ennemi de guerre qu’il faut combattre ou mourir.

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